Quand le sommeil descend sur
le calme des tombes,
dors, héritier de tant de veilles,
dors.
Quand la nuit vient bercer les ombres de nos morts,
dors pour calmer la vie encore inquiète,
dors.

Dors et rejoins le monde
d’avant toi
et les rêves d’avant la chair,
les rêves obstinés des morts,
mon enfant, dors.

Dors et rejoins la force émue des plantes,
la crue des fleuves sous le
manteau de la lumière,
les fleurs qui s’ouvrent
vers le soir et le raisin
lent qui mûrit, qui craint
l’orage. Dors.

Et pour que tourne cette terre
sur son axe
selon la grande mue du temps,
dans l’incessant
désir qui fait se mouvoir toute
chose, mon enfant, dors.

Dors pour que vivent encore en
toi les morts,
tandis que dans ton âme des
cités
s’éveillent, où tu marchas dans la
lumière d’un autre corps,
dors jusqu’à ton matin
de créature, mon enfant, dors.

Jean-Yves Masson, Poèmes du festin céleste, L’Escampette éditeur, Bordeaux, 2002
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